
Entretien avec le journaliste de France Football, Florent Torchut sur “Le Roi Leo” en VF (également disponible en espagnol et en catalan). Découvrez l'octuple ballon d'or sous la plume d'un de ses plus fins connaisseurs qui nous livre aujourd'hui les dessous de la rédaction de cet ouvrage publié aux éditions Solar.

Bonjour Florent et merci d'avoir accepté de répondre à nos questions. En guise d'introduction pourriez-vous nous raconter votre parcours de journaliste?
Depuis mon adolescence, j’ai toujours eu le désir de devenir journaliste. Dès le collège puis au lycée, je participais activement au journal scolaire. Par la suite, j’ai intégré Le Pays Malloins, un journal local de la région de Saint-Malo.
Quelques années plus tard, j’ai choisi de m’installer en Argentine pour proposer des sujets en tant que correspondant. J’y ai travaillé pendant sept ans, de 2009 à 2017, principalement pour L’Équipe et France Football. Je réalisais des reportages et des interviews de joueurs sud-américains, notamment en Argentine et en Uruguay.
En 2016, j’ai posé mes valises à Barcelone, où je continue de collaborer avec les mêmes médias, en couvrant notamment l’actualité du FC Barcelone. Mais depuis environ deux ans, mon rôle a évolué : je suis devenu reporter, ce qui m’amène à voyager beaucoup plus, notamment à l’étranger – comme en Grèce, à Athènes, par exemple.
Ce que j’aime dans ce métier, c’est la diversité : bouger souvent, partir sur le terrain, aller à la rencontre des gens. Ce qui me passionne le plus, ce sont les grands reportages, ceux qui croisent le football avec d’autres dimensions comme le social ou la culture.
Revenons à votre livre sur Lionel Messi, pourquoi avez-vous intitulé votre livre « Le Roi Leo » ?
C’est un clin d’œil à ma compagne, qui aimait beaucoup Le Roi Lion quand elle était enfant. C’est aussi un jeu de mots, car je me suis inspiré de la façon dont on dit Le Roi Lion en espagnol (“El rey león” en VO). C’est une référence double : à la fois personnelle et symbolique, puisqu’il est aussi considéré comme le roi du football, notamment en Argentine, où il est perçu ainsi depuis qu’il a soulevé la Coupe du monde.
Qu’est ce qui vous a incité à écrire un livre sur Lionel Messi ?
Je suis tout simplement Lionel Messi depuis 2009, l’année où il a remporté son premier Ballon d’Or. J’ai eu la chance d’être en Argentine à cette époque, lorsqu’il a gagné ses cinq premiers Ballons d’Or entre 2009 et 2016. Il en a remporté quatre d’affilée entre 2009 et 2012, ce qui m’a donné l’occasion de me rendre à Rosario et de rencontrer de nombreuses personnes de son entourage, ainsi que de mieux comprendre son parcours. Pendant quinze ans, je l’ai suivi de près, d’abord en Argentine, puis à Barcelone, où je le voyais jouer deux fois par semaine. J’ai ainsi pu l’observer de très près, et je l’ai interviewé à trois reprises. J’ai accumulé énormément de matière sur lui au fil des années.
Vous êtes passé de l’écriture d’articles en tant que journaliste à celui d’un livre. Quels différences avez-vous rencontrer lors de ce travail d’écriture comme auteur ?
L’écriture d’un livre demande beaucoup plus de temps, mais elle offre aussi davantage d’espace pour développer certains aspects, comme les traits de personnalité du sujet — en l'occurrence Lionel Messi. Cela m’a permis de raconter de nombreuses anecdotes et d’apporter beaucoup d’éléments biographiques : des photos, des interviews... Une biographie très complète, fruit d’un travail mené à la fois en Argentine et en Catalogne.
Dans le livre, on remarque qu’il y a beaucoup de photos qui retrace la vie de Messi. Comment avez-vous fait pour les choisir ?
En 2009, lors de mon tout premier reportage à Rosario, en Argentine, j’ai eu la chance de rencontrer des membres de la famille de Messi, notamment son père, ainsi que des journalistes locaux. Ils m’ont généreusement transmis beaucoup de matériel photo, notamment sur clé USB. Je trouve ça très chouette que les fans de Messi puissent découvrir ces images dans le livre car elles sont vraiment exceptionnelles.
Vous évoquez la ville natale de Messi, Rosario en Argentine, que l’on retrouve au début du livre. Comment avez-vous fait pour retracer sa vie et son parcours dans cette ville ? Et à qui vous êtes vous adresser pour cela ?
Ça s’est fait très naturellement, car entre 2009 et 2012, j’ai eu l’occasion d’aller à Rosario à plusieurs reprises — au moins quatre fois, peut-être plus. À chaque fois que Messi remportait un Ballon d’Or, je m’y rendais pour France Football afin de réaliser des sujets sur son enfance, ses débuts… J’ai ainsi eu la chance d’interviewer plusieurs personnes, plus ou moins proches de lui. Pour moi, c’était l’occasion idéale de rassembler une matière riche et précieuse.
On découvre tout au long du livre qu’il y a une particularité assez rare avec un joueur de cette envergure: des entretiens avec Messi. Pourquoi avez-vous choisi de mettre ces entretiens dans un livre ?
C’est tout simplement grâce à mon travail pour France Football que j’ai eu la chance de rencontrer Lionel Messi à plusieurs reprises — au total, quatre fois. Il m’a semblé intéressant de retranscrire ces échanges, car ils permettent de comprendre son évolution entre son premier et son dernier Ballon d’Or. Mettre en avant ces entretiens avait du sens : dans la plupart des biographies consacrées à Messi, on lui donne rarement la parole directement.
Pour vous, à quel moment Messi a-t-il atteint le sommet de sa carrière ?
Pour moi, il y a deux moments clés dans la carrière de Messi où il a véritablement atteint les sommets. Le premier, c’est pendant l’ère Guardiola au Barça, entre 2008 et 2012. À cette période, l’équipe tournait parfaitement : elle dominait ses adversaires, impressionnait le monde entier — y compris ceux qui n’étaient pas supporters du club. Le deuxième sommet, c’est bien sûr la victoire en Coupe du monde avec l’Argentine. Là, Messi est le véritable chef d’orchestre, et il signe un véritable récital en finale. C’est le couronnement ultime d’un joueur qui a su marquer toutes les époques.
On retrouve à la fin du livre de nombreux témoignages de grands joueurs qui décrivent Messi. Et vous, à titre personnel, comment le décririez-vous ?
Je pense que c’est un joueur extraordinaire, vraiment hors du commun sur le terrain. À mes yeux, il vient d’une autre planète, un peu comme Maradona à son époque. Pendant quinze ans, il a dominé le football mondial, que ce soit en Liga, en Ligue des champions ou en sélection nationale. Il a su maintenir un niveau d’excellence incroyable, saison après saison. Et ce qui est encore plus remarquable, c’est qu’en dehors du terrain, c’est quelqu’un de très humble, accessible et vraiment gentil.
Vous avez pu interviewer cette saison le nouveau prodige du Barça, Lamine Yamal. En tant que fin connaisseur du club catalan et de l’octuple ballon d’or, pensez-vous que Lamine Yamal peut être un jour le “futur Messi”?
Au départ, je trouvais les comparaisons un peu exagérées, car il faut d’abord attendre de voir ce que va devenir Lamine Yamal. Mais ce qu’il a montré depuis un an et demi, et la façon dont il s’est imposé en équipe première, est incroyable. Il possède une capacité exceptionnelle à dribbler, à finir ses actions et à créer le danger dans la surface adverse. Sa vision du jeu est impressionnante, surtout pour un joueur de son âge. Il réalise des passes et des décalages incroyables, ce qui est rare à cet âge-là. Lamine fait preuve d’une maturité footballistique et émotionnelle surprenante. Quand on discute avec lui, on se rend compte qu’il n’a même pas pleinement conscience de l’impact qu’il a sur le terrain, et c’est assez fascinant. Il a une sérénité naturelle et une grande humilité. Il aborde les choses avec une grande simplicité, ce qui lui permet de garder la tête sur les épaules, et je suis convaincu que cela va durer. Lamine est sur la bonne voie pour suivre les traces de Messi, mais il faut garder en tête que Messi a été au sommet du football pendant 15 ans. Lamine, lui, n’a que un ou deux ans d’expérience au plus haut niveau. Il réalise déjà de très belles performances, mais il n’est pas encore au niveau de Messi. Cependant, il s’en rapproche petit à petit. L’avenir nous dira si, dans plusieurs années, il atteindra cette régularité sur le long terme — sur presque 15 ans — qui fera qu’on pourra dire qu’il a été au niveau de Messi, ou non.
Par Myriam Laguerre

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